Retour tant attendu ~ Peterson-Jenkins family

Mystic Falls. Voilà un endroit que je ne pensais pas revoir de sitôt. À mon départ, j’avais imaginé que j’y reviendrais des années plus tard ou peut-être jamais. Sans doute, aurais-je revu Nate un peu plus loin, dans un lieu qu’on aurait décidé par avance. Question de préserver mon esprit de tous ces souvenirs qui m’ont à peine effleuré l’esprit tant j’avais pu mettre une certaine distance. Parfois, j’y arrivais sans peine, d’autres fois, l’affaire se compliquait bien plus que cela. Au cours de mon voyage, j’ai appris à accepter les choses qui se sont produites, j’ai pu faire un début de deuil tranquillement. J’acceptais mieux la disparition de mon jumeau même si le manque persiste encore dans mes chairs. Ça brûle de l’intérieur comme un feu qui jamais ne s’arrête. Par moments, ce dernier s’apaise, mais pour mieux repartir quand mes émotions n’en font qu’à leur tête. Un deuil, c’est très long, parfois interminable, mais je ne veux plus me laisser dévorer par ce mal qui m’a fait presque commettre l’irréparable. Ce qui m’a fait mal, j’ai décidé de ne plus m’en soucier. Mes parents n’existent plus à mes yeux. L’abandon et le silence m’ont été trop insupportables et je ne pourrais pas leur pardonner ce qu’ils m’ont fait. Au lieu de me soutenir et m’aider, leur solution, cela a été de me prendre un appartement et de vivre loin de la maison. Un foyer que j’ai toujours vu comme sûr et apaisant. J’ai commis une bêtise et ils m’ont puni pour ça autant qu’ils m’ont puni d’exister encore alors que James n’était plus de ce monde.

Mon départ avait sonné comme une évidence et un besoin. Nate m’a compris même si le simple fait que je parte lui fasse du mal. Mais j’en avais besoin pour remettre le pied à l’étrier. Lisandre a voulu m’accompagner et m’aider. Je ne le remercierais jamais vraiment comme il le mérite. Notre bulle, où une petite idylle est née entre nous, nous a été bénéfique et agréable. Mais les choses ont changé, pas comme on l’aurait voulu. Traqué par un chasseur, je n’ai fait que répondre à ce besoin de le protéger. Et le destin nous a frappé. Une vie en moins. Deux de sauvés. La mienne s’est vu transformer pour répondre à l’appel de la lune. Je suis une louve et depuis ce jour-là, aussi étrange que cela puisse paraître, je me sens parfaitement en accord avec moi-même. La première fois depuis très longtemps que ce genre de sensation vient m’animer.

Le paysage défile sous mes yeux et je reconnais quelques endroits où j’avais pour habitude d’aller seule ou avec James et Nate. Je reconnais de loin, me semble-t-il, l’endroit où j’ai trouvé Zeus, mon petit écureuil. Là-bas, je l’ai remis en liberté. J’espère qu’il a pu faire sa vie tranquillement, j’ai toujours pris soin de ne jamais l’éloigner de l’univers sauvage afin qu’il puisse s’en sortir. Quand le train entre en gare, je sens mon cœur battre la chamade. Ça y est ! On y est ! Je suis de retour pour un temps que je n’ai pas défini. En tout cas, Nate sera surpris de sentir ce changement en moi. J’ai eu de la chance que le directeur Saltzman m’accepte dans son établissement en tant qu’élève. J’avoue que je suis nerveuse à l’idée de redevenir une élève. Cela me semble si loin tout ça. Mes doigts n’ont plus cousu depuis des mois. Cette passion semble appartenir à une autre vie, me semble-t-il. La musique m’a grandement aidé et apaisé surtout.

Le train s’arrête et je prends mes bagages puis j’avance jusqu’à posé les pieds à Mystic Falls. << On y est. >> Fis-je en regardant autour de moi redécouvrant les lieux par des odeurs qui me semblaient minimes à l’époque, mais plus prononcées et précises aujourd’hui. Je reconnais un parfum et je tourne la tête pour revoir mon frère. Il n’a pas changé. Il reste toujours le même. L’homme frondeur, beau et charismatique avec cette pointe d’émotion qu’il offre si rarement. Laissant mes bagages au sol, je le serre dans mes bras à mon tour. Mes pieds ne touchent plus le sol tant l’étreinte est forte.

« Cela fait tellement plaisir de te voir. »

<< Tu m’as manqué. >> Comment est-ce que cela aurait-il pu en être autrement. Nate est tout ce qu’il me reste. Un être qui m’est cher et mon futur alpha étant donné sa position à l’école Salvatore. Si ces larmes ne coulent pas, les miennes se font doucement connaître. Quelques-unes que j’efface doucement d’un geste de la main.

« Laisse tes bagages je vais les prendre, j’ai commandé un taxi pour qu’on aille directement à ton appartement. »

<< Tu ne l’as pas vendu ? >> J’étais étonnée. Il me semble que je lui avais demandé de le faire. Peut-être avait-il besoin de mon appartement pour s’y réfugier de temps à autre. << Je suis contente de te revoir Nate. >> Je lui souris avec douceur. Ma louve, elle, sent la position du loup qui me fait face. C’est une odeur qu’elle doit apprendre à connaître et à accepter. Est-ce que Nate le perçoit maintenant ? Est-ce qu’il sait ce que je suis devenue ? Lui qui craignait que je devienne vampire et que l’on finisse par s’opposer lui et moi. << Comment vas-tu depuis la dernière fois ? Et me donne pas les informations à moitié, je sais quand tu me caches quelque chose. >>

L’étrangeté de ma présence ici sonne comme un retour dans le passé. L’impression que je vais voir James courir pour me prendre dans ces bras couvre mon esprit d’une douce chaleur. En quelque sorte, c’est le cas. Je reviens là où j’ai toujours vécu avec les miens, bien que les choses aient énormément changé. En partant d’ici, j’ai voulu mettre de la distance entre ceux qui ont provoqué ma douleur et tous ces endroits qui ne faisaient que renaître les souvenirs qui me faisaient mal. Ma nouvelle condition m’offre une force nouvelle sécurisante et je me sens moins seule à affronter la vie et ces tourments. Devenir louve, c’est avoir déclenché une force que je ne pensais plus avoir. Je me sentais trop éloignée et différente des miens. Une différence qui a fait qu’on m’a mise de côté en quelque sorte. J’ai tout fait pour sourire et continuer à vivre comme je pensais qu’il le fallait, mais soyons honnête. Je me sentais trop décalée vis-à-vis de ma famille. L’abandon de mes parents n’ont fait que confirmer cela et je ne veux plus entendre parler d’eux. Je ne peux pas leur pardonner de m’avoir mise de côté dans un moment où j’avais le plus besoin d’eux. Ils ont essayé de me joindre plusieurs fois quand je suis partie, mais je n’ai rien voulu savoir. Lisandre m’avait convaincu de prendre un appel pour savoir, mais nous nous sommes disputés. Se faire dire qu’on était stupide de partir et de tout abandonner m’a que plus enragé contre eux.

Le seul qui sera toujours le premier au plan de ma vie, c’est Nate. Lui qui m’a toujours soutenu même quand mes choix ne lui plaisait pas. Sortir avec deux vampires ne l’a pas vraiment enchanté, mais il ne m’en a pas tenu rigueur. Il est là, devant moi, avec ce sourire que je lui connais et cette tendresse qui n’a jamais changé à mon égard. Tout de suite, cette impression de solitude s’évade pour retrouver ce lien mis en suspens avec mon départ.

« Non, je n’en avait pas le cœur. Quand tu me manquais je m’y rendais car une certaine partie de toi était toujours là-bas. »

<< Je comprends… C’est tout aussi bien de le garder, j’en aurais peut-être besoin aussi. Qu’est-ce que je suis contente de te revoir. >> Je lui souris posant ma main sur sa joue réalisant plus encore que j’étais là, en face de lui. Pouvait-il sentir la louve en moi ? Ou bien était-ce encore tôt ? J’ai dû mal encore avec tout ça.

« Moi aussi, ça fait du bien de t’avoir en face de moi et pas seulement derrière le téléphone. »

<< Oui, c’est vrai que c’était compliqué même en visio. >> Je me rappelle avec une certaine nostalgie de nos appels quand je lui montrais les paysages que je pouvais voir. Ceux que James aurait aimé regarder. D’une certaine façon, j’avais l’impression qu’il m’accompagnait où j’aille. J’avais besoin de ça pour faire mon deuil.

« Eh bien il ne s’est pas passé énormément de chose, en dehors de mon inquiétude pour Aliana qui est plus grande. Son bourreau est de retour… On ne sait pas comment mettre la main dessus. »

Tout en marchant, j’apprends un peu les nouveautés et celle qu’il énonce n’est pas fait pour me réjouir. << Quoi ? >> C’est choquant d’apprendre cela. << Aliana doit être dans tous ces états. >> Fis-je en me souvenant de la fois où elle venue me trouver après avoir réussi à fuguer. << Je suis là maintenant, je vais vous aider. >> Il était hors de question de perdre encore un être qui m’est cher.

« Et toi ? Tu as l’air différente je me trompe ? »

J’esquisse un léger sourire sans savoir s’il le sentait ou non, mais je m’arrête dans un coin tranquille de la gare. << Oui… >> Je le regarde droit dans les yeux. << Autant te le dire maintenant… J’ai déclenché mon gène. >> Fis-je sans tourner autour du pot. << Oui je t’explique comment ça s’est passé. >> Je voyais bien ces interrogations soudaines. << Lisandre et moi, on se promenait tranquillement. À un moment donné, j’avais envie d’une glace alors je suis allée nous en prendre et en revenant, ce chasseur était entrain de l’attaquer. Il était tellement en rage qu’il ne m’a pas entendu alors… J’ai pris la première chose qui me tombait sous la main et ça a été fatal pour lui. >> M’appuyant contre un mur, les bras croisés sur ma poitrine, on pouvait voir que je ne regrettais pas mon acte. << J’avais tellement de rage… De peur aussi. Que j’ai simplement agi, je ne voulais plus perdre personne. Lisandre a gardé ces distances tout en me surveillant à ma première transformation, mais au bout d’un moment, on a su qu’il était temps de se séparer et j’ai appelé le proviseur Saltzman qui a compris la situation… Du coup à la rentrée, j’intègre l’école Salvatore. >> Je soupire. Je pensais qu’il me serait plus difficile de tout raconter, mais finalement, les mots sont sortis tout seul et sans aucune difficulté. << Je ne voulais pas t’en parler au téléphone, c’est un sujet trop important. Alors, j’ai préféré attendre mon retour. >> Je souris. << Mais bon, tu peux me compter comme louve dans ta petite meute ô grand alpha. >> Je lui fais un clin d’œil. << Mais ça ne m'empêchera pas de te sermonner non plus. >> Fis-je en rigolant mettant un petit point d’humour sachant que c’était beaucoup d’informations d’un coup.

Le voyage m’a été nécessaire pour parvenir à accepter et vivre avec tous ces deuils qui ont frappé ma vie. Mon jumeau d’une part, mais aussi de mon ancienne vie, de Thélio parti sans même se retourner. Avec Lisandre, les choses ont été plus douces et d’un commun accord. Essentiels à nos propres évolutions, nous devions suivre la route chacun de notre côté. Rien n’est figé, nous pourrions toujours nous revoir un jour, tout ce que je souhaite, c’est qu’il soit heureux. Il a été une parenthèse de douceur dans ma vie et notre relation a été tellement apaisante pour mon cœur. Nous avons vécu de belles choses durant notre voyage et ça, je ne pourrais jamais les oublier, qu’importe le temps qui passe. Mais nos natures sont promptes à se confronter l’une et l’autre, c’est indéniable. Quand ma louve prend le dessus, difficile de la stopper après tout, mon gène n’étant qu’à peine éveillé, je ne peux pas tout contrôler comme je le souhaiterais. Et je peux vous dire que c’est tellement agréable de laisser cet instinct prendre le dessus. C’est comme si tout ce que l’on a refoulé durant des années vient enfin à s’exprimer.

« En effet, et ce n’est pas la seule. Je suis vraiment inquiet pour elle, il faut vraiment qu’on trouve cette ordure. »

La voix de mon frère me ramène à la réalité et je me rends compte qu’avec sa présence, je suis enfin de retour à Mystic Falls, cela me paraît tellement irréel. Moi qui aie passé mon temps à dire que je ne reviendrais plus dans cette ville maudite. Finalement, on revient toujours à la case départ. << J’imagine qu’elle doit d’être terrorisée en ce moment. >> Je sais qu’Aliana est importante pour lui et bien plus qu’il ne peut le croire. Mais Nate n’est pas du genre à trop se plonger dans ce genre d’histoire de peur de perdre encore. Entre sa famille, James et moi qui a bien failli faire une connerie, les nerfs de mon frère ont été mis à rude épreuve. Un jour, sans doute, comprendra-t-il l’élan qui le conduit toujours vers sa meilleure amie.

« Je ne préfère pas que tu te mettes dans ce genre d’aventure, je m’inquiète déjà pour Aliana, je ne voudrais pas en plus devoir m’inquiéter pour toi. »

Je m’arrête pour lui faire face. << Ah, mais ce n’était pas une question Nate. C’est non négociable, Aliana est aussi importante pour moi et je compte bien aider que tu sois d’accord ou non. >> Je n’ai pas donné les preuves que je peux faire face à tout, surtout avant, mais j’ai changé, je sais que je peux aider. << Je ne veux plus perdre qui que ce soit Nate, tu ne peux pas t’en sortir tout seul. C’est ce que j’ai cru et regarde où ça m’a conduit. >> Mes parents m’ont mise de côté, je pensais pouvoir me battre, mais j’ai plongé si loin que j’ai bien failli ne plus revenir.

Quand la question de ma nature vient sur le plateau, je ne suis pas avare de mots pour expliquer ce qu’il s’est passé durant mon absence. Je ne m’attendais pas à devenir une louve et pourtant, je suis heureuse d’avoir changé, je me sens bien mieux même si j’ai besoin de contrôle encore.

« Je vois, et cela ne m’étonne pas que tu sois intervenue. Mais tu aurais dû me prévenir, je serais venu pour ta première pleine lune. »

<< Je sais Nate, mais ça s’est déroulé tellement rapidement. On ne se rend même plus compte du temps qui passe. Je me suis laissée entraîner. >> Rapidement et ce n’était pas pour me déplaire, je dois bien l’avouer.

« Je suis heureux de pouvoir te compter parmi mes loups alors. »

J’esquisse un sourire, lui donnant un léger coup de coude, taquine. On partagera plus encore que d’habitude et ça me fait plaisir. Je ne serais plus écartée comme j’ai pu le ressentir longtemps.

« Ça fait combien de temps que tu as déclenché ton gène ? La première pleine lune n'a pas été trop difficile ? »

<< 1 mois je crois… >> Les jours s’écoulent tellement vite que le temps n’est plus qu’un mot. << Assez oui, c’est assez troublant comme on peut sentir les émotions nous déchirer de l’intérieur autant que la douleur du corps qui change. Mais mais malgré ça… Je me suis sentie tellement bien une fois que je suis devenue complètement louve. J’étais libérée. C’est ça libérée. Quelque chose que je recherchais depuis tellement longtemps. >> Finalement, devenir louve, c’est libérer les émotions qui nous rongent de l’intérieur. Croyez-moi, j’ai dû faire à une tornade de sentiments plus douloureux les uns que les autres. << J’aurais aimé vivre ça avec James aussi… T’imagine, le trio qui vagabonde en pleine forêt. >> L’émotion me submerge, je n’arrive pas à faire autrement. Mon frère est encore un sujet douloureux, perdre mon jumeau, c’est perdre une partie de mon être. Arrangeant mon sac sur l’épaule, je le regarde et souris. << Je vais bien t’en fais pas… Lisandre m’a beaucoup aidé à affronter tout ça et à accepter les choses. >> Ce que mes parents auraient dû faire, c’est quelqu’un d’autre qui l’a fait. Est-ce que Nate se rend compte que je ne demande rien sur nos parents ? Se rend-il compte que pour moi, ils existent sans exister ? Je n’arrive pas à pardonner, la rancune est bien trop forte. << Si on rentrait, j’ai une de ces faims, mon estomac ne va pas tarder à crier famine. >> Je lui souris en le suivant. << Et tu m’expliqueras comment ça fonctionne l’école Salvatore. >>

Mon départ fut autant précipité que mon retour à Mystic Falls. Je ne pensais pas revenir un jour. En fait, je prévoyais de passer ma vie loin de là où j’ai perdu une grande partie de qui j’étais autrefois. Comment puis-je me sentir autant différente qu’avoir l’impression de rester la même personne ? C’est un interrogation à laquelle je n’ai pas su répondre jusqu’à présent. Même si je le cache, la douleur est là, ancrée au fond de mon cœur pour ne jamais la quitter. C’est une cassure que jamais rien ne refermera. Ni le temps, ni une personne qui saura faire la différence dans mon existence. Certainement, que je ne souhaite pas guérir de tout cela. La raison ? Et bien parce que dans la douleur, je puise une certaine force. Même si la louve en moi verse des larmes, je la sens, à sa manière, puissante et hargneuse contre ce qui pourrait la mettre en danger. Cette souffrance me porte vers la volonté de vouloir aider Nate dans l’objectif qu’il s’est donné pour Aliana. J’ai toujours senti qu’il ressentait plus que de l’amitié, même si cet idiot ne voit pas plus loin que le bout de son petit nez. Il a tellement perdu que s’attacher à nouveau est une source de douleur pour lui.

« J’aurais l’aide des professeurs et du directeur, je ne vais pas me lancer seul dans cette croisade. Cette personne est dangereuse, aussi bien pour Alia que pour le reste des élèves. »

<< Tu me prends vraiment pour la dernière des idiotes, Nate ? >> Je le connais trop bien et il le sait. Mon frère veut me convaincre de quelque chose et ça ne fonctionne pas. << Tu serais prêt à te battre seul contre l’enfer pour venger ou protéger une personne qui t’est chère. Alors, tu en feras de même avec Aliana, je le sais. >> J’hésite à croire à tout ça. Est-ce que le directeur va vraiment aider Nate dans cette bataille contre un être tel que celui qui a fait autant de mal à sa meilleure amie ? Peut-être, mais cela veut dire aussi se mettre en danger. Je sais, notre montre est un danger perpétuel qui va et vient à sa convenance.

Quand Nate change de sujet, c’est qu’il a envie de penser à autre chose ou dans mon cas, à me faire passer à autre chose. S’enquérir de ma première transformation est une importance capitale pour lui. Alors, que faire d’autre, à part le rassurer ? Mes mots semblent l’apaiser même si je lis en lui une forme de déception quant à son absence et la présence de Lisandre à mes côtés malgré le danger que cela représentait pour lui.

« Tu as totalement raison, parfois il m’arrive même de regretter que la pleine lune soit si peu présente. »

<< Ou de ne pas rester louve tout le temps. >> La vie humaine est une épreuve constante, alors qu’être louve, c’est se libérer de tout cela. Libre ! C’est un chant qui nous plaît et c’est pour ça qu’on court et hurle à la lune se laissant bercer par l’instinct animal que la lune fait ressortir à cet instant.

« C’est quelqu’un de bien. Je suis content qu’il ait pu t’accompagner contrairement à moi. »

<< Oui c’est vrai. Li a été vraiment d’une grande aide pour moi et pas qu’à ce moment-là. >> Je lui souris prenant sa main pour la serrer doucement. << Tu étais avec moi… D’une certaine façon, tout comme James… Pour t’être tout à fait honnête, en partant d’ici, j’étais convaincu de ne plus y revenir. >> Cette ville est synonyme de souffrance et de mauvais souvenir pour moi. << Mais en parlant avec Li, j’ai compris que je me sentirais vraiment apaisé qu’en revenant ici en faisant face à ma douleur. >>

Mon estomac fait savoir qu’il est affamé. Même si j’avais prédit qu’il le ferait sous peu. J’esquisse un sourire avant d’éclater de rire. << Bin oui, ça change pas, j’ai toujours un estomac sans fond. >>

« On fait ça, a moins que tu préfères qu’on passe se chercher un truc au Mystic Grill. Je suis certaine que ça t’a manqué. »

<< Oh oui ! Excellente idée ! Va pour le Mystic Grill, on se commande un bon menu composé de viande et on rentre à la maison pour déguster tout ça. Mais c’est moi qui invite hein. >>

C’est bien beau de discuter de tout ça, mais ma scolarité va être tellement différente. J’en ai suivi une que je qualifierais de plutôt normale. Je pensais en avoir fini avec tout ça et me voilà confronter à redevenir une élève.

« Pour l’école rien n’a vraiment changé tu sais. C’est toujours la même chose. Tu auras tes cours basique mélangé avec les autres élèves ainsi que les cours de spécialité pour les loups. Sans compter que tu feras certainement quelques entrainement avec la meute pour te défouler. Après pour ça ce n’est pas obligatoire. »

<< Je vais devoir repasser par des cours que j’ai probablement déjà suivi. Super, ça va être d’un ennui mortel. On ne peut pas choisir que la spécialisation loup ? >> Je soupire longuement. << Non, non, ça me va très bien. Après tout, je fais partie de ta meute. Même pas besoin de demander. >> Je souris en le regardant avant de grimper dans le taxi. << Au Mystic Grill s’il vous plaît. >> Je regarde Nate prenant sa main pour la serrer doucement. << De retour à la case départ… Hein ? >>

Cela fait des années que je connais Nate à présent. Depuis le jour où mes parents l’ont pris sous leurs ailes et l’ont adopté, je fus la première à véritablement me lier avec lui. Je me souviens encore à quel point, notre lien a pu rendre jaloux James. Et pourtant, par la suite, notre trio se forma avec une telle facilité. Si autrefois, je ne comptais que par deux, la venue de Nate, m’a appris à compter par trois. Notre lien a été si fort que nous savions ce que nous ressentions même loin les uns des autres. Bien sûr, c’était bien plus fort avec mon jumeau, mais je n’ai jamais laissé Nate de côté. C’est sans doute ma présence qui a su l’adoucir et le mener vers un chemin plus calme. Aujourd’hui, c’est lui qui tente de maintenir ce rôle alors, qu’il faut l’avouer, depuis que je suis louve, mon côté impulsif est plus vif, désordonné aussi. Cela doit être le lot de tous ceux qui sont comme moi. Nos émotions ne sont qu’un feu puissant qui jamais ne perd en intensité. Encore faut-il apprendre à garder les flammes à une hauteur raisonnable pour ne pas que cela finisse en incendie.

Je sais que mon frère veut me protéger, mais je ne peux pas rester là, les bras ballants attendant que les choses se passent comme une vache observant un train passer sous son regard.

“Tu as peut-être raison, mais je n’étais pas là pour t’épauler réellement.”

J’esquisse un léger sourire. Je sais que cela aurait été important pour lui d’être présent pour moi à ma première transformation. Mais peut-être qu’on a évité une catastrophe justement. Ma louve et l’autorité ça fait deux. Alors, il faut l’apprivoiser en douceur avant que celle-ci ne se laisse approcher par qui que ce soit, surtout un alpha. << On se serait confronté crois-moi… L’autorité, ce n’est pas vraiment ce que je préfère humaine ou en louve. Enfin, en tant que louve, c’est pire. >> Je lui fais un clin d’œil, ne désirant pas vraiment aller plus loin dans mes explications. << Mais le plus important, c’est que je n’étais pas seule. Lisandre savait que cela pouvait être dangereux pour lui, mais il est toujours resté à distance raisonnable, mais assez proche pour veiller sur moi. >> Il a été un compagnon de voyage merveilleux et un petit-ami adorable. Même si au fond, on savait qu’il n’y aurait pas de toujours entre nous.

“Ca je m’en doute, surtout qu’avec la transformation je trouve que l’appétit augmente.”

<< Je t’avoue que je n’en sais rien, j’ai toujours eu un gros appétit. >> Fis-je en riant. L’idée d’une bonne viande saignante me faisait presque grogner l’estomac. J’avais hâte de retrouver le Mystic Grill, de sentir à nouveau les divers parfums que ce restaurant pouvait offrir. Je sais que les souvenirs reviendront de plein fouet. Bonheur comme douleur dans la sensation que cela me procurerait, mais le passage était obligatoire pour ma part. Nécessaire même.

“Si ça te fait plaisir, mais la prochaine fois c’est moi qui t’inviterait. Par contre je paie le taxi.”

<< D’accord, moi, j’offre le restaurant et toi, le taxi. >> Cela me rassurait, il prévoyait déjà d’autres sorties en ma compagnie. C’est comme si les choses ne s’étaient jamais réellement arrêtées. Que tout continuait. C’était une sensation forte et rassurante.

“Malheureusement ça ne fonctionne pas comme ça, après ce qui est bien c’est que nos professeurs sont différents, tu verras certainement les choses d’une manière différente. Mais je ne t’en dis pas plus, tu le découvriras assez vite. ”

<< Je vais donc m’ennuyer dans les cours plus ou moins normaux. Mais bon, ça, je l’avais déjà dit au directeur Saltzman. Il a ri sur le moment, j’ai été un peu trop direct sur le moment. >> Je souris avec douceur. << Mais bon, il a été ravi de m’accueillir. >>

Une fois dans le taxi, la discussion de loups est close. La discrétion doit faire son œuvre à présent. Ce qui veut dire avoir un sujet de conversation bien plus compliqué pour moi.

“Je dirais plus un retour à la maison qu’un retour à la case départ.”

<< La maison ? >> Je laisse un rire amer se faire entendre. << Je n’ai plus de maison depuis bien longtemps Nate… Et tu le sais. >> Je serre les poings jusqu’à blanchir mes phalanges. Il y a des chemins qui me rappellent ces moments où je l’empruntais avec mes parents. << Et eux ? Comment ils vont ? Ils arrivent à se regarder dans un miroir ? >> Ma louve est là, hurlante, amère et dégoûtée. Elle n’est que l’expression de mes propres émotions multipliées par dix. << Arrête Nate… >> Fis-je calmement. << Je sais que tu voudrais une réconciliation, mais ça, c’est hors de ma portée. S’ils m’ont laissé tomber qu’en sera-t-il si je venais à les pardonner et que j’aurais à nouveau besoin d’eux, ils me laisseront encore de côté. Tandis qu’ils m’ont chassés, ils ne se sont occupés que de toi… Estime-toi heureux que je n’éprouve pas de colère envers toi aussi. >> Je soupire. << Comment le pourrais-je, tu es le seul avec Lisandre à m’avoir soutenu et jamais abandonné. >>

Maintenant, que Deana avait activé son gène lupin, elle avait enfin un point d’ancrage. L’école Salvatore a été et continue à être salutaire pour tous les êtres différents des humains. Vampires, loups-garous, sorciers… Ils ont un endroit où se rendre pour apprendre à vivre avec leur particularité et à se faire une place dans la société sans être un danger pour qui que ce soit. Sans doute que pour les lycanthropes, la chose se révèle plus compliquée, à cause, des émotions sont ressenties au centuple. Et la jeune femme le sait mieux que personne pour être née au cœur d’une famille de loup-garou. Elle-même éprouve une certaine difficulté à se contrôler et puis, elle considère toujours la louve comme une autre personne qui vit en elle. Il faut que Deana apprenne et se rentre une bonne fois pour toute dans la tête, qu’elles ne sont qu’une seule et même personne. Au final, la louve n’est qu’une extension de son être. Une part d’elle, que Deana a toujours dissimulée sans même véritablement s’en rendre compte. Ce n’est pas toujours simple à le saisir, mais l’école Salvatore est là pour l’y aider. C’est pour cela, qu’elle a demandé au docteur Saltzman si elle pouvait s’y inscrire. Ce dernier n’a même pas hésité à répondre à son appel. Autant dire, que c’est plus facile d’accepter que de trouver un étudiant complètement paumé qui ignore ce qui lui arrive.

“En même temps il a eu James et moi, il ne manquait plus que toi pour rejoindre l’école. Puis il te connaît par notre intermédiaire, tu es déjà venue plusieurs fois.”

<< Il doit sans doute souffler de soulagement en sachant comment tu peux être impulsif. Mais à voir si j’arriverais à te calmer. Je ne suis pas mieux dorénavant. >> C’est l’une des raisons qui a poussé Deana à mettre un terme à sa relation avec Lisandre. La jeune femme étant devenue un danger permanant pour ce dernier. Vampire et loup-garou ne faisant pas bon ménage. Une prise de tête et une morsure pouvait être fatale à Lisandre. Et cela, Deana ne se l’aurait jamais pardonné.

Bien que le début de la conversation ait été tranquille. La suite ne plaît pas vraiment à Deana. Les parents étant un sujet sensible et tabou pour celle-ci à présent. Après ce qu’il s’est passé, la jeune femme ne pouvait pas leur pardonner de l’avoir abandonné quand elle en avait le plus besoin. Bien sûr que Deana comprend le besoin de Nate de les rabibocher, mais ce n’est plus possible pour une personne qui a tiré un trait sur des êtres qui ne méritait plus qu’on leur accorde du temps.

“Ne crois pas ça, ils m’ont tout autant repoussé. Ne crois pas qu’ils ont pris soin de moi. Le deuil est douloureux, ils ont eu beaucoup de mal à accepter. Non pas que je défends leur acte, loin de là, ils n’auraient pas dû réagir ainsi avec toi.”

<< Et pourtant, ils l’ont fait ! Même après ce que je me suis fait. Au lieu d’être là, ils m’ont repoussé et prit un appartement comme si ça allait changer les choses. >> Rien que d’en parler, il y avait une forme de colère et de honte qui animait encore la jeune femme. C’était un appel au secours et les seuls qui y ont répondu, c’est Nate et Lisandre.

“Je ne te demande pas de leur pardonner, j’aimerais juste que tu puisses entendre ce qu’ils ont à te dire. Juste ça.”

<< Nate, je leur ai donné plus d’une fois la possibilité de me parler, qu’on puisse poser les choses à plat. Ils ont loupé leur chance. Et ce n’est pas maintenant que je vais leur donner une seconde de plus de mon précieux temps. Ma famille dorénavant, c’est toi. >>

Les mots sont peut-être durs à entendre pour quelqu’un qui n’a plus ses parents. Mais Deana a passé son temps à pleurer et à se demander ce qu’elle avait fait de mal. Elle ne compte plus les fois où elle s’est réveillée en pleurant et que la seule personne à être là pour la consoler, ce fut Lisandre. Nate aurait fait de même, de cela, la jeune femme en était persuadée. Les choses changent et évoluent. C’est exactement ça pour Deana, il faut qu’il l’accepte.

Le taxi s’arrête devant l’immeuble qui a été l’antre de sa solitude et de sa perdition en un sens. Nate l’a préservé pour avoir un point de chute et qu’il puisse se ressourcer. Peut-être avait-il l’impression qu’en y venant, il retrouvait cette sœur qui s’en était allée. Sourire aux lèvres, Deana descend allant récupérer ses affaires. << On dépose mes affaires et on va se faire ce repas au Mystic Grill comme au bon vieux temps. Et tu me diras tout ce que j’ai à savoir sur cette école et sur le comportement que je devrais avoir. >> Cela clos la discussion de plus tôt. De toute manière, mieux valait passer à autre chose.